[Guide de lecture] Le marxisme au Japon

Le Japon est certainement le pays non-occidental où le marxisme a connu au XXe siècle l’épanouissement théorique le plus saisissant, en milieu universitaire d’abord mais aussi en dehors. Pourtant, le marxisme japonais, « insularisé », reste au mieux rangé dans le cabinet des curiosités. Gavin Walker nous offre ici un aperçu synoptique sur son histoire, aussi ancienne et riche que méconnue, qui a vu se succéder reformulation de la « question nationale », débats sur la nature du capitalisme japonais et les voies de la révolution, théories et pratiques du soulèvement dans les campagnes et de la lutte armée, ou encore approches subjectives versus structurelles du capital. Se nourrissant d’un dialogue ininterrompu avec Le Capital de Marx, longtemps en prise immédiate avec les politiques du Komintern, puis de la Chine maoïste, le marxisme japonais n’était pas non plus sans entretenir des affinités avec les courants hétérodoxes de la tradition marxiste européenne. Ici comme ailleurs, un tel décentrement vient bousculer le grand partage entre le marxisme orthodoxe (soviétique) et le marxisme occidental, ouvrant d’autres espaces de pensée et d’action.

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I

Résumer l’histoire de la réception de Marx au Japon n’est pas une mince affaire. En fait, il est pratiquement impossible de donner une vue d’ensemble satisfaisante de l’un des ensembles linguistiques les plus profonds, prolifiques et bigarrés de la tradition marxiste. Bien que cela reste étonnamment peu connu dans les cercles européens et nord-américains contemporains, le marxisme a été le principal courant de recherche théorique au Japon pendant la majeure partie du XXe siècle ; on peut dire que le japonais est sans doute resté la langue la plus importante pour l’érudition théorique marxiste, en dehors de l’anglais, de l’allemand et du français ; toutefois, son histoire théorique reste relativement circonscrite au sein de ses propres frontières linguistiques. Depuis son entrée initiale dans le monde intellectuel japonais à la fin du XIXe siècle, l’analyse marxiste a rapidement constitué un champ vaste et osmotique imprégnant tous les aspects de la vie universitaire, la pensée historique, les formes d’organisation politique et les façons d’analyser la condition sociale. De nombreux exemples en témoignent, dont le fait, frappant, que les premières Œuvres complètes de Marx et Engels à avoir été publiées ne l’ont pas été en allemand, en russe, en français ni en anglais, mais en japonais, par la maison d’édition Kaizōsha en 1932, en 35 volumes supervisés par Sakisaka Itsurō.

Il n’y a que peu d’endroits au monde où la distinction entre l’histoire de la réception de Marx et l’histoire du marxisme soit si importante. Pourquoi ? Tout d’abord, alors que le Japon est le lieu de l’une des premières et plus éminentes réceptions de Marx (particulièrement pour le monde « non occidental ») et, au XXe siècle, l’un des pays capitalistes avancés les plus marqués, intellectuellement et socialement, par la pensée marxiste, la voie de développement de cette réception est quelque peu différente de celle empruntée par les principales sociétés comparables, avant tout en Europe et en Amérique du Nord.

Tandis que les réceptions anglaise, française, allemande, italienne, américaine et tant d’autres, de Marx, considèrent son travail comme étant immédiatement lié et intégré à l’histoire du mouvement ouvrier, on peut difficilement dire que cela soit le cas au Japon. Bien qu’un mouvement ouvrier fort et puissant ait existé depuis l’industrialisation intense des années 1870-1890, ce mouvement est principalement conditionné intellectuellement par une certaine orientation socialiste-nativiste qui a fourni le terrain politique à de nombreux mouvements sociaux du XIXe siècle, remontant aux dernières années du système féodal Tokugawa, avec ses contestations paysannes millénaires et formations de conscience sociale de masse. En ce sens, l’œuvre de Marx n’est pas seulement entrée au Japon comme avant-garde politique des mouvements ouvrier et socialiste, mais aussi (voire même principalement) comme avant-garde théorique de la pointe de la recherche sociale scientifique sur le caractère de la société moderne, avec ses deux pôles centraux : le rapport social du capital et la formation de l’État national moderne.

Le Capital de Marx a été publié pour la première fois en Allemagne un an avant la restauration Meiji de 1868, qui allait par la suite mettre le Japon sur la voie d’un développement capitaliste rapide, de l’industrialisation et du virage impérialiste sur le continent asiatique. La première introduction connue à Marx, bien avant la publication du Capital en traduction, était un texte simplement intitulé « Karl Marx », écrit par Kusaka Chōjirō, qui avait étudié en Allemagne en 1889-1890, dans le Kokka gakkai zasshi (vol. 6, n° 72-74) en 1893 (la 26e année de l’ère Meiji) (Suzuki 1956 : 1), bien que, comme le remarque Suzuki, il est improbable que le texte de Kusaka ait été basé sur une réelle lecture du Capital. Pour cela, nous devrions plutôt nous tourner vers l’un des principaux et importants penseurs des débuts de la réception de Marx au Japon, Yamakawa Hitoshi, dont le texte « Le Capital de Marx » a été publié en plusieurs parties dans son journal radical, l’Osaka heimin shinbun, dans 4 numéros en 1908 (Suzuki 1956 : 6). Yamakawa allait devenir plus tard l’une des figures clefs des premières batailles historiographiques qui allaient profondément marquer la réception de Marx au Japon et que nous aborderons brièvement.

Une tradition du socialisme, liée aux mouvements des ouvriers et des paysans, existait déjà, qui comptait parmi ses intellectuels renommés Kōtoku Shusui et Katayama Sen. Shakaishugi shinzui (L’Essence du socialisme) de Kōtoku a été publié la même année que Waga shakaishugi (Mon socialisme) de Katayama Sen, en 1903, un tournant dans le développement de la pensée marxiste au Japon (Sugihara 1998 : 47). Kōtoku, qui allait bientôt être exécuté dans l’« Incident de haute trahison » sur de fausses accusations de complot pour assassiner l’empereur, était le traducteur du Manifeste communiste, ainsi qu’un ancien socialiste engagé. Se tournant rapidement vers une position anarcho-syndicaliste au cours des années suivantes, le lien précoce établi par Kōtoku entre le système impérial et le développement du capitalisme au Japon allait rester l’un des principaux points de litige dans les débats ultérieurs au sein de la pensée marxiste. L’année suivante, à la veille de la guerre russo-japonaise de 1904-05, c’est la poignée de main de Katayama avec son homologue russe Gueorgui Plekhanov au 6e Congrès de la Deuxième Internationale à Amsterdam qui révéla au monde socialiste l’existence et l’importance du mouvement socialiste japonais. Katayama allait, au cours des décennies suivantes, mener une vie internationaliste extraordinaire : en tant que membre du comité exécutif du Komintern, il fut membre fondateur de trois partis communistes : le Parti communiste japonais, le Parti communiste des États-Unis et le Parti communiste mexicain, qu’il aida à fonder aux côtés de son camarade internationaliste indien M. N. Roy au cours de leurs improbables années de lutte commune à Mexico. Son histoire est d’autant plus remarquable que Katayama est né paysan misérable dans l’Okayama rural dans les derniers jours du système féodal (voir les premiers textes anglais de Katayama dans Katayama 1918).

Mis à part ces premiers développements de la pensée marxiste au tournant du siècle, la spécificité de l’œuvre théorique de Marx — et son essence dans Le Capital — demandait encore à être développée. En un sens, on ne peut dissocier la réception de Marx au Japon de sa centralité au sein du système universitaire. Des années 1910 aux années 1920, pendant l’ère Taisho, Le Capital de Marx est progressivement passé au premier plan, à tel point que faire référence aux jeunes hommes obsédés par Le Capital par le nom « Marx boy » [Marukusu bōi] est devenu monnaie courante. Cette nouvelle culture de l’étude de Marx a produit une génération extraordinaire de penseurs, dont un certain nombre allaient devenir d’importants théoriciens de Marx et du marxisme au sens large : Yamakawa Hitoshi, Fukumoto Kazuo, Inomata Tsunao, Noro Eitaro, Yamada Moritaro, Hani Goro, Uno Kozo, Kuruma Samezo et bien d’autres, aux côtés de ceux qui travaillaient dans le domaine même de la philosophie, comme Tosaka Jun ou Kakehashi Akihide. Le catalyseur ou tournant de toute cette période est sans doute la parution de Binbō monogatari (Récits de pauvreté) de Kawakami Hajime, qui est avant tout une sorte d’introduction populaire à la pensée socialiste, publiée en plusieurs parties, sur trois mois en 1916, dans le journal Osaka Asahi. Les articles ont été compilés en livre peu de temps après et se sont avérés si influents dans le climat intellectuel de l’époque, qu’en 1919 le livre avait déjà été réimprimé trente fois (Bernstein 1976 : 87). Ce texte, à son tour, a conduit Kawakami vers l’œuvre de Marx et en 1919, il publia la décisive Introduction au Capital de Marx (Shihonron nyūmon). Nombre de penseurs marxistes ultérieurs ont cité ce texte et sa parution comme le principal catalyseur de la popularisation de l’œuvre théorique de Marx. Uno Kozo, par exemple, a fait par la suite référence au travail de Kawakami comme l’un des premiers écrits ayant une valeur théorique en japonais (voir Uno 1970, vol. 1 : 214, 305). À la fin des années 1910, particulièrement au cours des deux années qui ont suivi le succès de la Révolution d’Octobre, la vitalité théorique de Marx au Japon fut fermement établie et une nouvelle ère de polémiques s’ouvrit (sur cette période en général, voir Wakabayashi 1998 : 147-206).

II

L’un des éléments distinctifs et centraux à avoir profondément conditionné la tradition marxiste au Japon, comme c’est le cas presque partout en dehors de l’Europe et de l’Amérique du Nord, est le statut nécessairement central de ce que l’on appelle la question nationale. Historiquement parlant, la « question nationale » a été largement associée aux recherches théoriques marxistes sur le « non occidental ». C’est pourquoi, généralement, c’est quelque chose que le marxisme occidental a souvent considéré comme étant réglé, bien que l’analyse de Gramsci sur le « Sud » et les questions coloniales restent une exception notoire. À l’inverse de l’exemple de la Russie impériale tardive ou des divers mouvements tiers-mondistes des années 1950 et 1960, la « question nationale » a souvent été traitée comme un simple signe d’une révolution bourgeoise incomplète. Dans la théorie et l’historiographie marxiste japonaise, cependant, cela n’a certainement pas été le cas. Condensée dans une période de cent ans, de la restauration Meiji de 1868 à l’explosion de la nouvelle gauche en 1968, l’histoire du Japon englobe l’émergence d’un État-nation moderne, s’industrialisant rapidement, la formation d’un empire multiethnique et multinational, la défaite de la nation et de son empire, l’occupation de l’ancien « centre » de son empire par les États-Unis suivi d’un développement économique stratosphérique, sous l’hégémonie américaine, au sein du deuxième plus grand pouvoir capitaliste à la fin des années 1960. C’est-à-dire que le cas japonais combine effectivement dans un même ensemble complexe les trajectoires d’un empire, d’une colonie, d’un pouvoir dépendant et d’un pouvoir dominant. Depuis l’introduction des sciences sociales modernes dans leurs inflexions allemandes et françaises au début de la période Meiji (1868-1912), une forme de question nationale est toujours restée la principale préoccupation : de la tentative de Fukuzawa Yukichi de transcrire le travail de Mill sur le sentiment national à l’intérieur du discours sur le « corps national », au focus hégélien sur « l’histoire mondiale » et les destins nationaux, la figure de la nation — historiquement nouvelle dans son sens politique moderne à cette époque — a constitué un véritable terrain de possibilité et d’inquiétude. Pas étonnant, donc, que cette cristallisation multidimensionnelle de la question nationale ait été pendant longtemps le problème fondamental auquel se sont confrontés les marxistes japonais : comment rendre compte de la position historique du Japon dans le monde (sur l’historiographie marxiste d’avant-guerre, voir Harootunian et Isomae 2008, en particulier la préface).

Un autre trait caractéristique de la tradition marxiste japonaise de l’historiographie a été son insularité relative, du moins dans la période d’après-guerre, vis-à-vis des marxismes d’ailleurs, ou plus spécifiquement son insularité unidirectionnelle. On rencontre fréquemment de l’incrédulité en Europe et en Amérique du Nord : « Le marxisme japonais ? Ça existe ? » Je ne dis pas ici que les marxistes japonais n’étaient pas au courant des développements de la théorie marxiste, à la fois dans ce que l’on appelle les marxismes occidentaux ainsi que les marxismes d’autres sortes. J’entends précisément le contraire. Alors que la tradition marxiste japonaise englobait et développait un niveau de développement exceptionnellement élevé, de bien des façons plus avancé que les débats contemporains en Europe, Amérique du Nord et ailleurs, particulièrement dans la période d’avant-guerre, la théorie marxiste japonaise était et continue d’être pratiquement inconnue à l’échelle mondiale, à l’exception de quelques personnalités. Même pour ces quelques personnalités qui sont entrées directement dans les débats marxistes à l’échelle mondiale, le contexte et l’histoire intellectuelle constituant le terreau de leurs positions ont été largement ignorés. Selon moi, les débats longs, denses et très complets sur la question nationale au Japon, en plus d’autres réflexions, nécessitent de repenser la division conventionnelle du marxiste occidental, du marxisme soviétique et des « autres » marxismes, qui soutient de nombreuses tentatives pour prendre en considération cet espace de pensée dans l’histoire intellectuelle moderne.

Cette prédominance du marxisme dans des disciplines universitaires japonaises telles que l’économie politique, la sociologie, l’histoire, etc., ne constitue qu’une partie de l’histoire. Il y a aussi une histoire politique décisive qui étaye l’influence majeure de la recherche théorique marxiste dans la situation japonaise. Après la fondation du Parti communiste japonais (Nihon kyōsantō) en 1922, le débat interne à la théorie marxiste s’est d’abord centré sur les questions de philosophie marxiste (chez les principaux théoriciens marxistes des années 1910 et 1920 tels que Kawakami Hajime, Yamakawa Hitoshi et Fukumoto Kazuo, parmi d’autres) : la connaissance théorique de la subjectivité, le problème de l’aliénation et la nécessité historique de la mission révolutionnaire du prolétariat. Après avoir bénéficié d’un soutien au début des années 1920, l’obsession austère de Fukumoto pour la ligne juste, qui serait qualifiée plus tard de théorie du « primat des idées justes » — le point de vue des « bunri ketsugō » ou l’unification du parti par l’élimination des éléments idéologiquement mauvais (littéralement « unité dans la séparation ») — est devenue la cible d’une dénonciation au moment de la publication des Thèses de 1927 du Komintern, largement rédigées sous l’influence de N. I. Boukharine (dès lors et jusqu’à ce jour dans le travail théorique marxiste au Japon, le terme « fukumotoïsme » a été utilisé pour critiquer avec mépris une certaine insistance hystérique sur la pureté de la ligne, peut-être similaire à la figure d’Amadeo Bordiga dans la situation européenne). Les Thèses du Komintern-PCJ de 1927 commençaient par la présentation d’une ligne théorique qui mettait l’accent sur la théorie de la révolution en « deux étapes » : le Japon n’était pas un État moderne pleinement réalisé, mais toujours accablé par des « vestiges féodaux » sous la forme d’une propriété foncière parasite, etc., et c’est cette analyse du niveau de développement du capitalisme japonais qui a initié les débuts de la scission qui allait culminer avec les Thèses de 1932 (Komintern 1961). En tant que principal pays « développé » par rapport à ses États voisins et principale puissance impérialiste en Asie de l’Est, le Komintern considérait le Japon comme l’objectif clef le plus important pour le projet révolutionnaire ; mais à la suite des Thèses de 1927, qui mettaient en avant le fait que la restauration Meiji de 1868 n’avait pas encore été totalement accomplie en tant que révolution bourgeoise démocratique nécessaire et transition vers le monde capitaliste moderne, une question surgissait : le capitalisme japonais des années 1930 était-il prêt pour la révolution socialiste — dans les conditions sur le terrain, était-il possible de trouver le sujet révolutionnaire de ce processus ?

De l’éclaircissement de cette question a émergé l’important et célèbre « débat sur le capitalisme japonais » (Nihon shihonshugi ronsō), un débat dont la pièce maîtresse a été la clarification des questions essentielles concernant le mode de production et le processus historique d’articulation de la formation sociale : à quel stade de développement se trouvait alors le Japon — comment et par quels moyens avait procédé le développement capitaliste japonais et existait-il un développement total concomitant de la formation sociale comme un tout, produisant ainsi la conscience politique nécessaire à la transition révolutionnaire ? La catégorie économique fondamentale de la vie sociale dans les villages — la forme du fermage (kosakuryō) — était-elle un « vestige » ou un « reste » de féodalisme, quelque chose de partiellement féodal, ou un produit du développement du capitalisme du monde moderne ? Le débat sur le capitalisme japonais, au sens encyclopédique, a eu lieu entre la moitié des années 1920 et la moitié voire la fin des années 1930, une période concentrée d’environ 12-15 ans. Ce débat, bien qu’au centre de la théorie marxiste, a eu une influence exceptionnellement large sur la formation de la pensée sociale japonaise et sur la formation des sciences sociales modernes japonaises de façon générale. De plus, il faut souligner ici que bien qu’il y ait eu également de vastes travaux exégétiques portant directement sur Marx dans les années 1920 et 1930, le principal domaine à travers lequel ont pris place les réceptions extrêmement complexes de Marx — non seulement du volume 1 du Capital, mais aussi du volume 2 (les schémas de reproduction) et du volume 3 (la catégorie de la rente foncière et ses explications théoriques) — a précisément été les analyses historiographiques et théoriques du capitalisme japonais.

Dans le débat sur ces questions, deux positions ont globalement émergé : l’une, qui est devenue celle de la faction Rōnō (ouvrier-paysan), qui affirmait que la réforme agraire instituée avec la restauration Meiji de 1868 — qu’ils considéraient franchement comme une révolution bourgeoise démocratique — a apporté la solution au « sous-développement » de la campagne, semant les premières graines qui allaient mener au plein développement capitaliste ; l’autre, qui est devenue celle de la faction Kōza (« discours ») (qui représentait la ligne principale du PCJ et du Komintern), affirmait que la restauration n’avait pas été une révolution pleinement bourgeoise démocratique, mais plutôt une transition incomplète vers la modernité et que le capitalisme japonais n’était que partiellement développé, sur une base essentiellement féodale. Les Thèses de 1927 du Komintern, en rompant avec l’accent mis ultérieurement sur le processus révolutionnaire socialiste immédiat, a posé les conditions pour la rupture entre le PCJ et la faction Rōnō (particulièrement Yamakawa Hitoshi et Inomata Tsunao). Mais dans ses Thèses de 1932, le Komintern a renforcé cette ligne davantage encore en parallèle avec la situation mondiale, en appelant à une révolution démocratique bourgeoise s’appuyant sur les masses, contre l’absolutisme et le féodalisme concrétisés dans la forme du système impérial (tennōsei) (sur l’histoire du débat, voir Nagaoka 1985 ; Hoston 1987). La principale influence auctoriale et conceptuelle durant cette période de la politique du Komintern sur la « question nationale » était Otto Kuusinen, qui, lors de la 12e plénière du Komintern de cette même année, lança un appel général pour des actions de masses subordonnant les revendications communistes aux besoins immédiats du large front de masse. En affirmant qu’une plateforme politique directement communiste aliénerait et maintiendrait le parti séparé des strates rurales pauvres et « non avancées » de la classe ouvrière, cet appel a en fait démarré la transition au sein du Komintern vers la ligne du front populaire adoptée quelques années plus tard, en 1935.

Au Japon, la position de la faction Kōza et la prédominance de ce débat ont été pleinement établies avec la publication en 1932 de leur Discours sur l’histoire du développement du capitalisme japonais (Nihon shihonshugi hattatsushi kōza) en 8 volumes. Les travaux présents dans ces volumes étaient en préparation bien avant la publication des Thèses de 1932 et devraient par conséquent être considérés non comme une expansion de la position de ces Thèses, mais davantage comme préparant le terrain à l’hégémonie de cette position à la suite des Thèses de 1927. Noro Eitarō, un leader du PCJ, qui a été arrêté et est mort en prison deux ans plus tard, en 1934, a supervisé la compilation du Discours. Noro pouvait être considéré comme celui ayant le plus préparé, concrètement, le terrain pour les conceptions globales de la faction Kōza. Pour lui, l’unique façon d’articuler véritablement et effectivement la conséquence politique de la théorie, la stratégie prolétarienne, était de se concentrer sur la « particularité » (tokushusei) du développement capitaliste japonais. La raison en était, d’après ce qu’affirme Noro, que sans compréhension du mode de production « dominé » (hishihaiteki) (c.-à-d. la structure agraire semi-féodale de la campagne), on ne peut pas comprendre la façon spécifique dont le développement des forces productives a nécessité un virage impérialiste. Cette logique fondamentale a été reprise par Otto Kuusinen, qui était alors le leader du Bureau oriental du Komintern, chargé de préparer les analyses des conditions révolutionnaires en Asie de l’Est. Kuusinen a prononcé l’affirmation célèbre : « Nous observons l’oppression ininterrompue et sans limites de la paysannerie, conditionnée par des vestiges du féodalisme (hōkensei no zansonbutsu) exceptionnellement puissants. Le village japonais est pour le capitalisme japonais une colonie contenue au sein de ses propres limites domestiques (Nihon shihonshugi ni totte jikoku naichi ni okeru shokuminchi de aru). » Il continuait : « La transformation bourgeoise japonaise reste remarquablement incomplète (ichijirushiku mikansei de ari), étonnamment incertaine ou indéterminée (ichijirushiku hiketteiteki de ari), et est par essence partielle et inachevée (chūtohanpa). » Précisément en raison de ces éléments, expliquait-il, le capitalisme japonais est mutilé ou déformé (sur ce point, voir Walker 2016). Il tombe sous le sens que les débats sur la transition dans le contexte japonais fonctionnaient allégoriquement pour réfracter les lignes de luttes au niveau politique (la thèse « semi-féodale » menait à une théorie de la révolution en deux étapes ; la thèse d’un capitalisme accompli conduisait à une théorie en une étape), mais ils ont également servi de laboratoires d’expérimentation théorique sur le statut du Capital de Marx et la façon d’appliquer ses réflexions à la conjoncture locale.

Dans la période de l’après-guerre, le Parti communiste japonais, revigoré après des décennies de répression gouvernementale, a fleuri et s’est épanoui comme source de résistance politique et de force organisationnelle intellectuelle. Au début des années 1950, la logique politique autour de laquelle le PCJ avait théorisé sa position a commencé à évoluer vers la forme d’une lutte de « libération nationale », une lutte armée pour se libérer de la « subordination », inspirée de la ligne révolutionnaire chinoise. Cette ligne était largement vantée par certains leaders du PCJ, en particulier Tokuda Kyūichi (1894-1953), qui avait passé 18 ans en prison sous les Lois de préservation de la paix avant la guerre et Nosaka Sanzō (1892-1993), qui avait passé la guerre dans différents endroits et qui avait établi des liens avec le parti chinois, fuyant les purges rouges entreprises par les forces d’occupation américaines dans la ville de Pékin récemment libérée.

Ils soulignaient en particulier la continuité, plus que la rupture, des anciens rapports fonciers qui existaient dans la campagne japonaise, ce qu’ils décrivaient comme un « système parasite de propriétaires terriens » (kisei jinushisei) : avec cela comme colonne dorsale décisive de l’asservissement de la « nation », le PCJ a entamé un mouvement au destin funeste de retour dans les villages. Cela a pris la forme de l’« Unité d’opération des villages de montagne » (Sanson kōsakutai) quasi clandestine, des groupes de cadres et d’étudiants qui se rendaient dans les villages, pour faire de l’agitation parmi les paysans et tenter de susciter une étincelle révolutionnaire dans le milieu rural (Mao, « Une seule étincelle peut allumer un feu de prairie ») afin de semer les graines d’un « encerclement des villes ». Ce mouvement était condamné dès le départ, non seulement en raison du fait que les paysans se désintéressaient, dans l’ensemble, du mouvement, mais aussi du fait que leurs conditions, bien que toujours enlisées dans une épouvantable pauvreté, avaient évolué avec les réformes agraires après-guerre, suffisamment du moins pour diminuer le « parasitisme » direct qu’ils affrontaient et, par conséquent, suffisamment pour rendre inefficaces les appels à l’action révolutionnaire lancés par les « corps d’opérations » (Koschmann 1996).

Cela représente cependant certainement bien plus qu’un simple échec de stratégie politique : bien que le PCJ ait rapidement renié le retour au village, en tant qu’« aventurisme gauchiste » (kyokusa bōkenshugi) et rejeté officiellement la ligne de la lutte armée en 1955 lors du sixième Congrès, la mémoire matérielle et affective des opérations dans les villages est restée un point essentiel de la politique littéraire, de l’inspiration politique, tout comme de l’imagination et de l’expérimentation tout au long des années 1950 et des suivantes.

Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Parti communiste japonais est revenu au premier plan de la société japonaise, renforcé par le sacrifice et la légitimité de ses principaux leaders, Nosaka et Tokuda. Salués comme n’ayant pas été corrompus par les années de guerre, le PCJ et le Parti socialiste japonais ont entrepris une démarche électorale concertée en 1946 et 1947. Alarmés par la vaste faveur dont jouissaient ces partis, MacArthur et le Commandement suprême des forces alliées ont pris une décision décisive : ce qui fut connu plus tard par les historiens sous le nom de « marche arrière », un changement de stratégie pour prévenir la diffusion du socialisme plutôt que chercher avant tout à débarrasser l’État japonais du fascisme. Ainsi, les « purges rouges » de la fin des années 1940 ont cherché à annihiler la soudaine résurgence de la tradition communiste japonaise d’avant-guerre, qui fut un temps la plus puissante d’Asie (dans les années 1920 et 1930) et la source d’une œuvre théorique majeure au sein de la pensée marxiste. Cela a conduit le PCJ dans la clandestinité et mené à une courte période (de la fin des années 1940 à 1955) durant laquelle l’accent a été mis sur la lutte armée, le travail illégal clandestin et une proximité renouvelée avec la ligne chinoise (sur la question de la nation au cours de cette période de la pensée marxiste, voir Gayle 2003). En 1955, au sixième Congrès du PCJ d’après-guerre, cette ligne de la lutte armée dans les campagnes a été reniée, ses défenseurs exclus et un nouveau « compromis historique » (sur le modèle du parti italien) mis en place, ouvrant la voie à la transition complète du PCJ vers le réformisme et la participation au gouvernement. En un sens, ce moment peut être vu comme la première émergence à l’échelle mondiale d’une « nouvelle gauche » marxienne, un an avant que les événements de 1956 en Hongrie ne génèrent un processus similaire dans les partis communistes d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord.

Alors que les années 1950 arrivaient à leur terme, une nouvelle masse sociale d’étudiants, d’intellectuels, d’ouvriers et de paysans, ainsi que les classes populaires, s’élevèrent de nouveau, en particulier autour de la reconduction en 1960 du Traité de sécurité nippo-américain (Anpo, dans son abréviation japonaise). La première manifestation de masse des années 1960 autour de la protestation contre l’Anpo mobilisa un nombre considérable de personnes : l’une des trois grèves générales majeures à laquelle avaient appelé les syndicats rassembla à elle seule 6,2 millions de personnes dans les rues en juin 1960. Avec ce niveau intense de mobilisation, une nouvelle gauche combative se forma, annonçant un nouvel ordre social : cette nouvelle gauche au Japon, qui n’était plus redevable envers le PCJ, alors considéré par de nombreuses personnes à gauche comme ayant trahi leur politique, donna lieu à l’une des décennies les plus intenses du XXe siècle en termes d’organisation, de pensée et d’esthétique politiques (voir les textes dans Haniya 1963).

III

Si, avant-guerre, le débat sur le capitalisme japonais — son caractère, son développement, son mode de relation avec l’émergence du capitalisme décrite dans le Capital — était focalisé sur le rapport entre l’historique et la logique, l’essor de l’écriture théorique marxiste après-guerre tendait à être divisé entre l’analyse méthodologique du capital lui-même et la recherche d’une philosophie de la subjectivité se situant autour de la théorie de l’aliénation et caractérisé par un intérêt porté au jeune Marx. Ces lectures, particulièrement celles de Kakehashi Akihide, Kuroda Kan’ichi et Umemoto Katsumi, ont toutes tendu vers une approche de Marx centrée, jusqu’à un certain point, autour du sujet, ou de ce que Kakehashi nommait la « compréhension subjective » (shutaiteki ha’aku) du capital, avec une centralité concomitante accordée à la figure du « travail humain ». En revanche, Uno Kozo et ses principaux collègues, des personnalités telles que Suzuki Koichiro et Iwata Hiroshi, parmi d’autres, ont formulé par opposition une lecture relativement structurelle, centrée sur le Capital, se préoccupant principalement de trois points : 1) la clarification méthodologique du Capital en termes de niveaux d’analyse (logique ou « principe » ; stade ou mode de développement capitaliste ; analyse conjoncturelle) ; 2) la centralité de cette quasi-marchandise particulière qu’est la force de travail ; 3) l’importance d’une théorie de l’impérialisme interne à une relecture du Capital. Alors que nombre de ceux qui l’entouraient parlaient du « capitalisme mondial » (Iwata), revenaient à la question agraire (Ōuchi Tsutomu), ou développaient des lectures logiques du Capital à part entière (Suzuki Kōichirō), le travail d’Uno, bien que soigneusement séparé de la politique proprement dite, ou des luttes partisanes internes à la gauche marxiste de plus en plus intenses, est devenu néanmoins très important au sein de la nouvelle gauche (Suga 2005 ; Walker 2018). Dans le sillage de 1968 et de l’éclipse des mouvements armés (par exemple, l’Armée rouge unifiée et le Front armé anti-japonais d’Asie de l’Est [Higashi ajia han-nichi busō sensen]), une nouvelle direction est apparue au début des années 1970. Marqué par la parution de Marukusu sono kanōsei no chūshin de Kojin Karatani [Marx : vers le centre du possible] et de Shihonron no tetsugaku de Hiromatsu Wataru [La Philosophie du Capital], ce moment a été celui d’un retour au cœur de l’écriture de l’œuvre de Marx, là encore avec un certain degré de séparation vis-à-vis de la politique marxiste existante.

La prose philosophique extraordinairement dense de Hiromatsu, avec sa focalisation sur la catégorie philosophique de la réification en relation avec la théorie de la forme-valeur, a eu beaucoup d’influence sur la génération des années 1960, notamment en raison de l’engagement de Hiromatsu dans le mouvement étudiant. Son travail, non seulement dans le domaine de la philosophie, mais aussi dans la correction active du manuscrit de L’Idéologie allemande pour offrir un texte plus juste marxologiquement, a produit de nombreux exemples d’importance philosophique durable, peut-être symbolisé dans son ouvrage de 1974, The Philosophy of Marx’s Capital (Hiromatsu 1974).

Hiromatsu était, bien sûr, surtout une figure faisant le lien avec le point culminant de la philosophie marxiste d’avant-guerre, représentée par Tosaka Jun ou Miki Kiyoshi, alors qu’exactement en même temps, le travail de Karatani a apporté au sein de la lecture de Marx un moment qui a coïncidé avec le développement de la théorie critique (dans son sens large, plutôt que dans celui, étroit, de l’École de Francfort), particulièrement aux États-Unis, où Karatani a passé du temps, à Yale dans les années 1970 et où il a ensuite enseigné, à l’Université de Columbia. Depuis la célèbre conférence Johns Hopkins sur les « Sciences de l’Homme » en 1966, la « French Theory » avait connu un développement intense, particulièrement en Amérique du Nord. En un sens, la généralité fournie par le langage de la théorie ne constituait pas un développement tout à fait nouveau au Japon, où un certain type de croisement entre la critique littéraire et la théorie sociale a longtemps été acceptable comme discours public, y compris par moments totalement en dehors du système universitaire. Marx : Towards the Centre of Possiblity de Karatani, publié en plusieurs parties dans le magazine littéraire Gunzō en 1974 a représenté une rupture — ou plutôt se situe lui-même à l’intérieur d’une rupture, pourrait-on dire — avec la lecture prédominante de Marx en 1968 : celle du jeune Marx, une lecture lukácsienne de la figure du travailleur aliéné. Cette nouvelle approche prenait en compte une lecture littéraire ou linguistique, centrée sur la textualité du Capital, une lecture transversale entrecroisée avec la linguistique structurelle (Saussure), la psychanalyse (Freud et Lacan) et la déconstruction (Heidegger et Derrida). En un sens, le texte de Karatani peut aujourd’hui être considéré, sous un jour intellectuel-historique, comme un élément clef dans lequel la tradition de la théorie marxiste japonaise a puisé un nouveau point de départ à l’échelle globale de la théorie critique (Karatani 1990). Cela conditionnera fortement le développement de ce qui a été appelé le « nouvel académisme » dans les années 1980, quand Karatani lui-même et Asada Akira (dont les propres travaux sur Marx étroitement liés à Deleuze et Guattari, autant qu’aux questions de psychanalyse et d’esthétique, allaient être très importants) sont devenus des personnalités critiques dominantes.

Aujourd’hui, dans les premières décennies du XXIe siècle, il ne fait aucun doute que la lecture de Marx reste un élément déterminant du paysage intellectuel japonais, bien que l’on soit en peine de nommer un intellectuel réellement dominant ou hégémonique, dans le style d’Uno, Hiromatsu ou même Karatani (qui continue lui-même d’écrire, quoique sans l’influence exceptionnelle qu’il a eue dans les années 1990). Les lectures japonaises de Marx ont accompagné en parallèle la mondialisation post années 1990 de façon intéressante : d’un côté, il y a eu une « internationalisation » significative des théoriciens, historiens et philosophes marxistes japonais, au sens où les modes de lecture dominants sont maintenant moins centrés sur des figures et positions qui avaient été déterminantes dans le développement de la pensée marxiste japonaise (les positions Rōnō/Kōza, le travail d’Uno, de Hiromatsu, le travail plus explicite de l’école de Kyoto ont influencé des théoriciens comme les personnalités d’après-guerre Kuroda Kan’ichi, Kakehashi Akihide, etc.). Mais d’un autre côté, le reste du monde reste profondément ignorant de la tradition japonaise, une particularité qui peut seulement être expliquée par la distance linguistique, puisqu’à tous les autres niveaux, le japonais est certainement une langue dans laquelle existent autant d’analyses théoriques marxistes puissantes que ce qui a été écrit en français, en espagnol, en italien et dans d’autres langues répandues dans le monde. Il est certain que le caractère hyper-méthodologique de la pensée marxiste en langue japonaise du milieu du XXe siècle n’a pas facilité sa réception, ce qui était en partie dû à la polémique quelque peu obscure dans laquelle s’ancrait une bonne partie de celle-ci.

Alors que l’internationalisme de la période d’avant-guerre, soutenu à la fois par l’existence de l’Union soviétique et spécifiquement par le Komintern d’avant le front populaire (1935), fournissait une globalité aux premières décennies de théorie marxiste au Japon, la période d’après-guerre a vu un recul de cette dimension internationale, avec quelques rares exceptions notables (dans le champ de l’histoire, certains marxistes importants comme Toyama Shigeki et Takahashi Kōhachirō étaient certainement connus mondialement). Les révolutions de 1968 et la formation de la nouvelle gauche à la suite de 1955 ont fourni une autre globalité, mais cette fois-ci à un niveau de contemporanéité des événements et processus, plutôt que d’engagement étroit. Le jeune trotskysme des années 1950, en lien avec des organisations françaises telles que Socialisme ou barbarie, était l’une des voies possibles (Kuroda Kan’ichi, plus tard le leader suprême de la Faction marxiste révolutionnaire [appelée Kakumaru-ha] était, dans les années 1950, le correspondant japonais de S ou B) ; les organisations de lutte armée, avec leurs actions directes et leur passage de la résistance armée au terrorisme pur et simple au Liban, en Europe de l’Ouest et dans le Sud-Est asiatique, en était une autre.

Dans les années qui ont suivi 1968, une nouvelle génération a émergé, qui n’était plus nécessairement redevable envers l’expérience de la tradition marxiste japonaise en tant que telle. Après les années 1990, il y a eu un nouveau changement au sein de la sphère de la théorie marxiste et de l’analyse marxienne au Japon, qui a produit des voix à la fois extraordinaires et puissantes, qui devraient être davantage diffusées de façon large dans d’autres langues (pour deux exemples récents et importants, voir Ichida 2015 et Nagahara 2017). La tradition érudite marxienne reste extraordinairement répandue, elle entretient de nouveaux liens avec l’ensemble florissant des travaux sur la théorie de la forme-valeur (bien que les nombreuses possibilités de liens entre la Neue Marx-Lektüre et ses ancêtres dans les divers débats japonais sur la forme-valeur restent un point à développer davantage), ainsi qu’avec un nouveau travail lié à la réception de figures philosophico-politiques françaises et italiennes.

L’aperçu ci-dessus, très schématique, n’est rien d’autre qu’une sorte de substitut impossible à une vaste tradition bibliographique conceptuelle. Cela reste une tâche cruciale pour les marxistes aujourd’hui que de mettre en lien cette gigantesque histoire théorique en langue japonaise avec ses équivalents de par le monde.

Traduit de l’anglais par Sophie Coudray

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Gavin Walker