De l’aliénation ou les vicissitudes de la jouissance

La catégorie d’aliénation est souvent tenue pour allant de soi chez Marx. Pourtant, comme le montre Nicole-Édith Thévenin dans ce texte, même le jeune Marx propose un concept d’aliénation largement ambivalent. Dans la continuité d’Althusser, Thévenin propose une relecture critique du concept, qui divise sa portée entre une acception dominante, perméable au réformisme, et une conception révolutionnaire. S’appuyant sur Lacan et la critique marxiste du droit, elle montre que l’aliénation n’appelle pas, pour les sujets, à une reconquête des produits de leur travail, mais à briser les rapports marchands et juridiques qui les chevillent à la jouissance capitaliste.

Idéologie juridique et idéologie bourgeoise (Idéologie et pratiques artistiques)

Derrière la « personne juridique », il y a la marchandise et l’État : c’est d’abord le sujet privé de l’échange marchand, celui qui « possède » et dispose du droit de vendre ou d’aliéner sa possession ; c’est ensuite les appareils de l’État, combinant coercition et idéologie, pour mettre en œuvre le droit, l’inculquer à ses sujets. Ce texte, paru pour la première fois en 1973 dans la revue La Pensée, illustre cette problématique au prisme du droit d’auteur. À travers une recension détaillée de l’ouvrage de Bernard Edelman Le Droit saisi par la photographie, Nicole-Edith Thévenin décrit la crise du sujet que traverse le capitalisme avancé et les limites intrinsèques du droit face à la socialisation de plus en plus poussée du procès de production artistique.