Émeute, grève, émeute : entretien avec Joshua Clover

L’émeute est rarement prise au sérieux comme lutte politique à part entière. Généralement considérée avec mépris par les marxistes, elle est accusée d’apolitisme et associée à l’instant pur, à un spontanéisme dépourvu d’objectifs tactiques et stratégiques. Pour Joshua Clover, auteur de Riot, Strike, Riot, il ne s’agit pas de faire l’éloge de l’émeute, mais de la théoriser et, plus généralement, de saisir les formes de contestation dans la longue durée des cycles d’accumulation. Selon Clover, à l’époque du capitalisme naissant, l’émeute est la forme de lutte dominante, qui vise à perturber la circulation des marchandises. Puis, au moment de la révolution industrielle et jusqu’à l’immédiate après-guerre, c’est la grève qui lui succède, en s’appliquant cette fois à la sphère de la production. Depuis les années 1960-70, dans une période marquée, en Occident, par la désindustrialisation, le chômage de masse et le ralentissement de l’accumulation, l’émeute redevient la forme de contestation par excellence.