Nation, race et impérialisme dans la gauche allemande depuis la réunification

D’où viennent les Antideutsch ? Quelle a été la trajectoire de ce courant de la « gauche » allemande, célèbre pour son ralliement à Israël et son opposition à tout anti-impérialisme ? Selim Nadi revient sur le soutien accordé au cours des 20 dernières années par cette nébuleuse à différentes politiques nationalistes. À partir d’une analyse historique de la campagne « Nie Wieder Deutschland », de la seconde guerre du Golfe et de la guerre en ex-Yougoslavie, l’auteur retrace la généalogie du néo-nationalisme d’une partie de la gauche allemande.

Pour déracialiser, il faut penser la race (et la classe)

Il faut définitivement se débarrasser des approches des classes sociales qui passent outre les considérations sur la race. Eilzabeth Esch et David Roediger présentent diverses analyses de Bourdieu, Wacquant, Adolph Reed ou encore Darder et Torres, qui font volontairement l’impasse sur la race. Les auteurs proposent à l’inverse de relire plusieurs épisodes récents en Australie, en Afrique du Sud ou au Venezuela pour apprécier l’importance théorique et militante d’un antiracisme qui prenne en compte la race.

[AUDIO] Black communism : rencontre-débat avec Paul Heideman

À écouter : la rencontre « Black communism ». Paul Heideman revenait alors sur le Parti communiste aux États-Unis et sa politique antiraciste. Il nous racontait l’histoire étonnante d’un parti, constitué par des émigrés européens à peine arrivés sur le Nouveau continent, devenu en quelques années le premier parti de la cause noire, de Harlem à l’Alabama. Agrégeant artistes et intellectuels, de Billie Holiday à Duke Ellington en passant par W.E.B Dubois ou encore Richard Wright, le PC étatsunien fut aussi un laboratoire des luttes, à travers les ligues de chômeurs ou le syndicalisme interracial. Une immersion dans l’Amérique ségrégationniste et dans les résistances qui ont scandé son histoire.

Difficultés dans la théorisation marxiste de la race

La race pose problème au marxisme : comment éviter de réduire le racisme à un « dommage collatéral » de l’oppression économique ? Comment éviter de formuler des hypothèses historiques trop contraignantes sur ses origines et sa portée ? E. San Juan Jr. propose ici, dans un texte séminal publié pour la première fois en 1989, de confronter ces problèmes à partir du concept d’hégémonie et de conjoncture. La race et les luttes antiracistes se conçoivent dès lors comme des résultats singuliers de stratégies hégémoniques.

Antideutsch : sionisme, (anti)fascisme et (anti)nationalisme dans la gauche radicale allemande

Dans ce texte, Selim Nadi revient sur une mouvance singulière de la gauche radicale allemande. Appelée « Antideutsch », opposée à la réunification allemande et par conséquent à toute existence d’une entité étatique allemande comme source d’un potentiel « quatrième Reich », elle s’oppose avec véhémence à toute forme d’anti-impérialisme et prône un soutien sans failles à la politique de l’État d’Israël. Une mouvance désormais minoritaire certes, mais dont l’idéologie ne semble pas sans influence. L’occasion pour Selim Nadi d’interroger certaines ambiguïtés de la gauche allemande et européenne quant à la question de la nécessaire lutte anti-impérialiste.

L’islamophobie et les théories critiques du racisme

Dans cette contribution, Fanny Müller-Uri et Benjamin Opratko se proposent de passer le concept d’islamophobie au crible de la riche tradition d’analyse marxiste de la race. L’islamophobie pose en effet un défi aux interprétations traditionnelles de la race et du racisme. L’islamophobie invite à davantage penser la race et le racisme comme des constructions sociales fortement spécifiées historiquement, ainsi qu’à mieux cerner l’intrication entre leurs dimensions « biologiques » et « culturelles ». Ces précisions permettent de mieux situer la place de la race dans les luttes d’hégémonie et de contre-hégémonie.